Plogoff n'aurait pas pu se faire sous la loi de sécurité globale

Plogoff n'aurait pas pu se faire sous la loi de sécurité globale

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Plogoff, des pierres contre des fusils aurait-il pu se faire sous la loi relative à la sécurité globale et son article 24 ? On nous pose souvent la question en ce moment.

Non, bien sûr : comment aurions-nous pu prendre le risque d'un an d'emprisonnement et de 45 000 euros d’amende, alors qu'on n'avait déjà dû emprunter au-delà du raisonnable pour financer notre film ?

Mais ce qui était possible sous Valéry Giscard d'Estaing risque bien de ne plus l'être en 2021. Les années Giscard ne nous ont pourtant pas laissé le souvenir d'une grande transparence dans les décisions gouvernementales (rappelez-vous les résultats de l'enquête d'utilité publique à Plogoff), ni d'une grande indépendance des médias audiovisuels... Les télévisions nationales ont pris leur temps avant de couvrir les événements. C'est d'ailleurs l'une des raisons qui nous a convaincus qu'il fallait faire ce film. Pour témoigner de ce soulèvement populaire qui ne trouvait que peu d'écho en dehors de la Bretagne.

A Plogoff, en 1980, les CRS n'étaient pas ravis qu'on leur plante notre caméra sous le nez. Pas enchantés qu'on capte leurs expressions alors qu'ils tentaient de rester stoïques sous les harcèlements des femmes. Pas franchement emballés à ce qu'on saisisse sur pellicule les charges et les arrestations.

En 1980, certes, notre film a attendu plus que de raison son numéro de censure. Et il a fallu un changement de gouvernement pour qu'il bénéficie comme les autres longs-métrages des aides "automatiques". Pour autant, en 1980, personne ne nous a interdit de faire notre travail, aucune loi ne nous a empêchés de filmer les forces de l'ordre, ne nous a dissuadés de montrer les CRS et gardes mobiles à visages découverts.

Comment rendre compte d'un soulèvement populaire ou d'une manifestation sans images ? C'est la liberté d'informer qui se trouve remise en question par l'article 24 de ce projet de loi relative à la sécurité globale.

 

Proposition de loi relative à la sécurité globale. Article 24

"Est puni d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende le fait de diffuser, par quelque moyen que ce soit et quel qu’en soit le support, dans le but qu’il soit porté atteinte à son intégrité physique ou psychique, l’image du visage ou tout autre élément d’identification d’un fonctionnaire de la police nationale ou d’un militaire de la gendarmerie nationale lorsqu’il agit dans le cadre d’une opération de police.»